L’affaire

1. Pourquoi devons-nous sortir des énergies fossiles de toute urgence ?
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Investir dans le développement de nouveaux projets d’énergies fossiles prolonge notre dépendance à ces ressources catastrophiques pour l’environnement, et dont la flambée des prix est la source principale de l’inflation que nous vivons actuellement.

Parce que cesser de miser sur les énergies fossiles est une priorité brûlante si nous voulons éviter les conséquences les plus dramatiques des changements climatiques.
Malgré le consensus scientifique (GIEC, Agence Internationale de l’Energie) sur le fait que l’exploration et l’exploitation de tout nouveau champ pétrolier ou gazier est incompatible avec un réchauffement global limité à 1,5°C1 , et alors que nous sommes déjà confrontés à des catastrophes climatiques en série, 95 % des producteurs de pétrole et de gaz explorent ou prévoient de développer de nouvelles réserves d’hydrocarbures2 , grâce aux précieux soutiens financiers de banques comme BNP Paribas.

Parce que cesser de miser sur les énergies fossiles est la seule voie pour une transition véritablement sobre et juste. La hausse des prix de l’énergie n’est pas uniquement contextuelle – épidémie de COVID-19, guerre en Ukraine –, elle est systémique.
En privilégiant pendant bien trop longtemps le charbon, le pétrole et le gaz sur le déploiement des renouvelables ou la rénovation thermique, les décideurs politiques et économiques, et en particulier les grandes banques, nous ont propulsés dans les crises actuelles. Ils font porter les impacts de ces choix sur notre quotidien, notamment sur celui des plus modestes.

Parce que cesser de miser sur les énergies fossiles, c’est aussi s’attaquer aux profiteurs de crises. Les grandes entreprises de l’énergie et de la finance semblent déterminées à continuer à tirer (grand) profit du pétrole et du gaz, au dépend du climat, des droits humains et de la justice sociale. En 2022, sur fond de guerre en Ukraine et de flambée des prix, Total et BNP Paribas ont cumulé des profits record dans leur histoire, enregistrant respectivement 20 milliards et 10 milliards d’euros de profits.

Il est urgent de garantir que les financements d’aujourd’hui nous sortent de notre dépendance aux énergies fossiles pour permettre, sans attendre la prochaine crise, la voie vers une transition écologique, sobre et juste.

1. Agence internationale de l’énergie, 2021, Net Zero by 2050. 2. Urgewald, 2021, Global Oil And Gas List.
2. Pourquoi une banque, ça pollue ?
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Par leurs soutiens financiers à des entreprises, projets, particuliers ou Etats, en France ou à l’international, les banques rendent possibles des projets polluants et encouragent des entreprises émettrices d’émissions de gaz à effet de serre. Les émissions de gaz à effet de serre des banques sont liées aux principales activités économiques qu’elles mènent, notamment en finançant ou investissant dans une entreprise. Les banques peuvent financer des entreprises, c’est-à-dire injecter de l’argent, à l’aide d’outils tels que les prêts. En plus de ces financements, les banques soutiennent également les secteurs d’activité par un autre canal : les investissements sur les marchés financiers. Autrement dit, elles achètent des actions et des obligations d’entreprises, sources de rentrées d’argent pour ces dernières. Elles sont ainsi au cœur des décisions économiques : BNP possède ainsi des actifs financiers équivalents au PIB de la France3.
Ces financements et investissements sont autant de manières par lesquelles une banque contribue à générer des émissions de gaz à effet de serre. En 2020, 88 % des émissions de gaz à effet de serre de BNP résultait de ses financements ou investissements dans les entreprises4. Le reste des émissions était associé aux crédits et investissements dans le secteur public, et, marginalement, auprès des particuliers. Ainsi l’empreinte carbone de BNP s’élevait à 749 millions de tonnes équivalent CO2 en 2020, soit une empreinte carbone supérieure à celle du territoire français5.

3. S&P Global, 2022, Europe’s 50 largest banks by assets 2022. 4. Oxfam France, 2020, Banques : des engagements climat à prendre au 4ème degré. 5. Oxfam France, 2021, Banques et climat : le désaccord de Paris.
3. Pourquoi cibler BNP ?
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Si les émissions de gaz à effet de serre de BNP sont aussi considérables, c’est parce qu’encore aujourd’hui, elle finance et investit massivement dans les industries polluantes, notamment les énergies fossiles. Entre 2016 et 2022, BNP s’est imposée comme le 1er financeur européen et 4e mondial de l’expansion des énergies fossiles6. La banque française se positionne notamment en leader dans certains secteurs en plein développement malgré leurs impacts dévastateurs sur des écosystèmes ultra-sensibles : BNP était ainsi le 1er financeur mondial de l’exploitation pétro-gazière en mer, sur la même période7.

Les raisons de ces soutiens importants ? Derrière un logo vert et étoilé, la banque française entretient des liens puissants avec les plus grands noms de l’industrie fossile. Entre 2016 et 2022, BNP était ainsi le 1er financeur mondial de 9 géants du pétrole et du gaz, dont Total8. Cette seule poignée d’entreprises prévoit plus de 200 nouveaux projets d’énergies fossiles d’ici 2025, qui entraîneraient l’émission de 8,6 gigatonnes de CO2 supplémentaires dans l’atmosphère, soit l’équivalent des émissions sur toute leur durée de vie de 77 nouvelles centrales à charbon9. Les bombes climatiques n’existeraient pas si des banques n’étaient pas là pour les financer.

Même si BNP a pris l’engagement public de “s’aligner sur une stratégie 1,5°C”, ses politiques actuelles ne permettent ni d’atteindre un tel objectif, ni de se conformer à l’exigence posée par l’Agence internationale de l’énergie : cesser tout nouvel investissement dans l’exploration et l’exploitation d’énergies fossiles10.

C’est notre argent à toutes et tous confié aux banques qui finance des projets climaticides. Les citoyennes et citoyens ont le pouvoir d’agir en soutenant massivement cette action et en exigeant que leur argent finance la transition écologique et sociale, et non plus le chaos climatique.

6. Rainforest Action Network, BankTrack, Indigenous Environmental Network, Oil Change International, Reclaim Finance, Sierra Club, Urgewald, 2023, Banking On Climate Chaos. 7. Ibid 8. Ibid 9. Oil Change International, 2022, Big Oil Reality Check. 10. Agence internationale de l’énergie, 2021, Net Zero by 2050.
4. Pour quel motif attaquons-nous BNP en justice ?
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Les Amis de la Terre France, Oxfam France et Notre Affaire À Tous attaquent en justice BNP pour non-respect de son devoir de vigilance en raison de ses activités de financements et d’investissements qui soutiennent le développement des énergies fossiles. Il s’agit d’un recours juridique inédit : c’est la première fois en France et dans le monde qu’une banque commerciale est poursuivie en justice pour ses activités climaticides.

Qu’est-ce que le devoir de vigilance ? Grâce au combat de nombreuses organisations de la société civile et de parlementaires, la loi sur le devoir de vigilance est entrée en vigueur le 27 mars 201711. Cette loi historique oblige certaines multinationales françaises à identifier, prendre des mesures propres à limiter et prévenir les risques et les atteintes graves aux droits humains, à la santé et à la sécurité des personnes, et à l’environnement causées par leurs activités et celles de leurs filiales, fournisseurs et sous-traitants, tant en France qu’à l’étranger. Ces mesures doivent être publiées dans un plan de vigilance, et surtout mises en œuvre de façon effective. En cas de manquement, la loi autorise toute personne intéressée à saisir la justice et à demander au juge d’enjoindre à l’entreprise de se conformer à ses obligations, voire dans un second temps de rechercher sa responsabilité civile. Depuis des années, nous menons l’enquête et publions des rapports sur la responsabilité de BNP dans la crise climatique et ses soutiens sans faille aux énergies fossiles. Les preuves s’accumulent.

Avec ce cas concret, nous voulons donc nous assurer de l’application ambitieuse de cette loi : elle nous permet de saisir la justice pour stopper la folle course de BNP dans les énergies fossiles, et l’empêcher de continuer à faire peser des risques lourds et irréversibles sur les habitant·es, la biodiversité, l’environnement et le climat. Surtout, si les juges confirment que des manquements sont avérés, cette loi pourrait nous permettre de faire jurisprudence. Les impacts d’une victoire se feraient donc ressentir dans la totalité du secteur financier.

Que demandons-nous précisément à BNP Paribas ? La banque doit respecter son devoir de vigilance, se conformer à l’Accord de Paris, et cesser immédiatement ses soutiens financiers à l’expansion des énergies fossiles.

11. Legifrance, 2017, Loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre.
Pour en savoir plus :

Nos organisations, soutenues par de nombreux citoyens et citoyennes, sont persuadées que le recours à la justice constitue un nouvel outil innovant et puissant, non seulement pour contraindre les principaux responsables du chaos climatique à respecter la loi, mais aussi pour permettre un débat public sur ces enjeux de société cruciaux pour notre avenir.

Les étapes de la procédure :

  • Le 26 octobre 2022, nous avons envoyé un courrier de mise en demeure à BNP, pointant les éléments de non-respect de la loi sur le devoir de vigilance par l’entreprise. Elle a trois mois pour nous répondre et se mettre en conformité avec ses obligations : identifier les risques d’atteintes graves aux droits humains, à l’environnement et au climat résultant de ses activités financières, puis élaborer, publier et surtout mettre en œuvre de façon effective des mesures à même de prévenir ces risques ou atténuer les atteintes existantes. À l’échéance de ces trois mois, en l’absence d’action effective de BNP, nous pourrons alors nous tourner vers le juge et assigner BNP en justice.
  • Le 24 janvier 2023, après un délai légal de trois mois, BNP Paribas a répondu à notre mise en demeure en communiquant sur de nouveaux engagements. Néanmoins, ni ces promesses publiques, ni la réponse officielle envoyée par BNP aux avocats représentant les associations ne sont suffisants pour répondre à l’urgence climatique. En effet, la banque refuse toujours de cesser immédiatement ses soutiens à de nouveaux projets pétroliers et gaziers, et n’engage toujours pas de sortie à court-terme du secteur des énergies fossiles.
  • Le 23 février 2023, nous assignons BNP Paribas en justice, devant le Tribunal judiciaire de Paris. Il s’agit du premier contentieux climatique visant une banque commerciale en raison de ses financements à l’industrie des énergies fossiles et sa responsabilité dans le changement climatique.

BNP Paribas est une multinationale très puissante. Ses moyens financiers considérables risquent de faire durer cette bataille juridique sur plusieurs années. Elle va tout tenter pour nous faire renoncer.

C’est pourquoi le soutien de toutes et tous est essentiel : le pouvoir citoyen peut nous permettre enfin d’obtenir justice face à BNP.